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Conférence sur la recherche en matière de politiques autochtones

Assemblée des premières nations

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La participation électorale des Autochtones (Élections Canada)
Présentée par Tonio Sadik

Le 12 mars 2009



Introduction

  • Il était très intéressant d'avoir l'occasion de prendre connaissance à l'avance des trois présentations d'aujourd'hui :
    • Jacobs (York)
    • Harell, Matthews et Panagos (Queen's et CMR)
    • Howe et Bedford (UNB)
  • Je prendrai quelques minutes pour décrire le travail accompli par l'Assemblée des Premières Nations en collaboration avec Élections Canada, en vue d'accroître la participation électorale des membres des Premières nations, et pour y réfléchir à la lumière des présentations d'aujourd'hui.
  • Chacune de ces trois présentations était très intéressante. Celle de Jacobs ajoute de nouveaux éléments aux théories sur la participation électorale des Autochtones, alors que les présentations de Harell et al. et de Howe et Bedford mettent en lumière de nouveaux chiffres sur les habitudes de vote et les facteurs déterminants du vote des Autochtones.

Initiative de l'APN visant à « faire sortir le vote »

  • La phase 2 de l'initiative « faire sortir le vote » de l'APN a été amorcée en 2006 dans la foulée d'une élection tenue en janvier de cette année-là.
  • Comme le mentionne l'étude de Howe et Bedford, l'APN, sous la direction du Chef national Phil Fontaine, a vigoureusement exprimé son appui à la participation des Premières nations aux élections fédérales.
  • L'APN s'est surtout employée à fournir de l'information essentielle aux Premières nations au moyen d'un guide d'information à l'électeur et d'une vaste campagne de sensibilisation dans les médias, autochtones et autres.
  • Ce travail était en grande partie basé sur la recherche et l'analyse effectuées, comprenant des groupes de discussion, un forum pour les jeunes et une analyse statistique sur le taux de participation des électeurs dans les 308 circonscriptions du Canada.

Recherche

  • Les études présentées aujourd'hui constituent une importante contribution aux données de recherche peu nombreuses qui existent concernant la participation électorale des Autochtones.
  • Cependant, il y a toujours trop peu de données disponibles sur les taux de participation électorale des Autochtones au Canada.
  • Une bonne partie de l'information – qu'elle soit issue de l'Enquête sociale générale ou de l'enquête Equality, Security and Community – est recueillie à un très haut niveau; à tel point que nous demeurons perplexes lorsqu'il s'agit de répondre à de graves préoccupations sur le processus électoral.
  • Par exemple, les Premières nations ont été confrontées à un problème majeur lors de la dernière élection fédérale (le 14 octobre 2008) :
    • La Loi électorale du Canada a été modifiée en 2007 pour obliger les électeurs à prouver leur identité et leur adresse au bureau de scrutin.
  • Il était possible de satisfaire à ces exigences de l'une des façons suivantes :
    • présenter une pièce d'identité originale délivrée par un gouvernement ou un organisme gouvernemental où figurent la photo, le nom et l'adresse municipale;
    • fournir deux pièces d'identité originales autorisées par le directeur général des élections du Canada, toutes deux portant le nom de l'électeur et l'une son adresse municipale;
    • prêter serment, appuyé par un répondant inscrit sur la liste électorale de la même section de vote et qui possède la ou les pièces d'identité acceptées.
  • En fait, et ironiquement, le gouvernement fédéral ne délivre aucune pièce d'identité pouvant répondre à toutes les exigences établies par la nouvelle loi fédérale – pas même un passeport.

Identification de l'électeur

  • Si pour beaucoup, présenter une pièce d'identité est évident, nous ne pouvons ignorer que les nouvelles exigences ont provoqué d'importants problèmes sur le terrain, en particulier pour les électeurs autochtones des zones rurales.
  • Le problème, c'est que plusieurs électeurs autochtones n'ont tout simplement pas les pièces d'identité à présent exigées par la Loi électorale du Canada.
  • Par exemple, nombre de personnes vivant en milieu rural ne reçoivent pas leur courrier à domicile et n'ont donc pas d'adresse municipale (adresse de résidence) sur leurs pièces d'identité, mais plutôt une adresse de boîte postale ou de poste restante.
    • Ces pièces d'identité (p. ex. une facture de services publics où figure un numéro de boîte postale) NE satisfont PAS aux exigences d'adresse et ne sont donc pas des pièces d'identité acceptables à un bureau de scrutin.
  • Même si la Loi électorale du Canada a été modifiée pour permettre un assouplissement des critères de preuve d'adresse, ces critères demeurent problématiques pour l'électeur autochtone.
  • La difficulté toutefois, si l'on revient à nos présentations, est que nous n'avons pas de données adéquates nous permettant de mesurer l'impact de cette modification législative sur les taux de participation électorale lors de la dernière élection.
  • Non seulement nous ne connaissons pas avec certitude le nombre d'électeurs potentiels qui n'ont pas voté aux bureaux de scrutin, mais nous ignorons également combien d'entre eux ont choisi de ne pas voter parce qu'ils ne comprenaient pas les exigences liées au vote ou qu'ils savaient ne pouvoir y satisfaire.
  • Reprenons la référence faite par Jacobs à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Sauvé, « Le suffrage universel constitue [...] un élément essentiel de la démocratie » (p. 7) : que veut-elle dire dans le contexte de ces modifications législatives?
    • Je dirais que la situation actuelle est plutôt regrettable.

Centre d'appels de l'APN

  • Nos constatations empiriques sont fondées sur une démarche que nous avons entreprise conjointement avec Élections Canada et qui a consisté à tenter de joindre par téléphone, durant les 36 jours de la période électorale, tous les bureaux des conseils de bande au nord du 55e parallèle et dans sept autres circonscriptions comptant un fort pourcentage de population en zone rurale.
  • C'était évidemment une façon plutôt laborieuse et chaotique d'évaluer la situation et d'y faire face, mais nous avons jugé qu'elle était nécessaire à la diffusion de l'information sur les nouvelles exigences d'identification.
  • Sur un total de 349 appels, 262 ont permis de prendre contact avec un agent de la bande.
  • Comme on pouvait s'y attendre, la grande majorité des personnes contactées n'étaient pas informées du changement, et fait encore plus important, quand elles l'étaient, elles n'avaient pas nécessairement les pièces d'identité requises pour satisfaire aux nouvelles exigences de la Loi.
  • Cela me ramène à nos présentations d'aujourd'hui.

Études et présentations

  • L'examen que fait Jacobs de la « conscience juridique » des électeurs autochtones nous offre un contexte théorique utile pour une mise en application plus pratique de solutions au problème du faible taux de participation électorale.
    • Le portrait dressé par Jacobs peut nous mener à l'importante question soulevée par Howe et Bedford, à savoir : « quelle part de l'écart [du taux de participation] est de source proprement "autochtone" et laquelle est simplement le reflet de variables sociodémographiques plus générales [...] »? (p. 31)
    • Harell et al. se penchent également sur cette question lorsqu'ils examinent ce que signifient la désaffection et la résistance autochtones, en particulier chez les jeunes, et ce que la littérature considère plus généralement comme des nouveaux mouvements sociaux.
  • Le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones s'est justement réuni le 11 mars 2009 afin d'examiner les problèmes de la présente session, et un sénateur a évoqué le manque « d'à-propos culturel » consistant à demander aux gens des petites communautés autochtones en zone rurale de prouver leur identité alors qu'ils ont vécu toute leur vie côte à côte :
    • Qu'est-ce que cela peut signifier sur le plan de la « conscience juridique » des gens, dans le contexte de la nouvelle loi et de ses exigences?
  • Si nous reconnaissons que des facteurs démographiques comme l'âge ont une incidence sur la participation électorale, tout comme les facteurs d'ordre pratique telle la mobilité (Howe et Bedford, p. 28), il semble que nous devions désormais adopter une approche à plusieurs facettes, afin d'influer sur ce que Jacobs examine comme étant « l'exercice des droits » (p. 8).
    • À quoi pourrait ressembler la structure d'une telle méthodologie de recherche?
  • Tous les auteurs ont reconnu – et nous voulons le réaffirmer – la nécessité de tenir compte non seulement des grandes différences régionales et culturelles qui existent entre les groupes autochtones, mais aussi des expériences et des aspirations distinctes constatées au sein des sous-groupes, par exemple, par Harell et al. dans le cas des habitudes de vote des Premières nations de langue pied-noir et crie (p. 20).

Conclusion

  • Si, à la suite des présentations faites aujourd'hui, nous savons que l'âge et le niveau de scolarité sont des variables importantes de la participation des électeurs autochtones,
    • nous NE savons cependant PAS quelles seront les conséquences de certains problèmes très concrets – tels que l'absence de pièces d'identité acceptables – sur la participation future des électeurs autochtones.
  • C'est l'espoir de l'APN (et nous avons déjà entrepris des discussions avec Élections Canada à cet égard) qu'en plus d'en apprendre davantage sur les raisons pour lesquelles le taux de participation des peuples autochtones aux élections fédérales est plus faible que chez les autres Canadiens,
    • nous puissions continuer à envisager des stratégies de nature à réduire les conséquences négatives des récentes modifications législatives sur les efforts visant à accroître la participation des électeurs autochtones aux élections fédérales.
  • Jacobs a fait observer que ces initiatives pourraient comporter, entre autres, une discussion sur l'histoire du droit de vote autochtone au Canada – et le 50e anniversaire du droit de vote des Autochtones pourrait en offrir l'occasion l'an prochain.
  • L'APN poursuivra avec plaisir sa collaboration avec Élections Canada et a déjà amorcé des discussions préliminaires à cette fin.
  • Je vous remercie.