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Prévenir les communications trompeuses avec les électeurs

Introduction


Le présent rapport fait suite aux incidents survenus lors de la 41e élection générale du 2 mai 2011, concernant des communications trompeuses avec les électeurs. Même si l'enquête du commissaire aux élections fédérales se poursuit et l'ampleur de ces incidents et l'identité des personnes en cause restent à établir, la nature des actes commis est bien connue. La réaction du public à ces incidents témoigne de l'importance que les Canadiens accordent à l'intégrité de leur processus électoral et de la nécessité de prendre des mesures pour éviter que de tels incidents ne se reproduisent.

Ce rapport est le premier de deux rapports de recommandations thématiques présentés à la suite de la 41e élection générale. Vu l'importance des enjeux et la nécessité de prendre des mesures à temps pour la prochaine élection générale, il fallait aborder immédiatement la question des communications trompeuses. Le second rapport traitera de façon plus générale du besoin de réviser et de moderniser les mécanismes de conformité et d'exécution de la Loi électorale du Canada, afin de les rendre plus efficaces et mieux adaptés au caractère régulatoire du régime. Nous prévoyons présenter ce second rapport au printemps 2014.

Comme il a été indiqué au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre le 29 mars 2012, l'objectif de ce premier rapport est d'examiner les mesures de prévention et d'exécution de la Loi qui devraient être prises concernant les communications trompeuses. Si certaines mesures proposées sont de nature administrative, la plupart requièrent une modification législative.

Le rapport s'appuie sur un document de discussion publié début novembre 2012. En préparation de ce rapport, Élections Canada a consulté les électeurs canadiens, et, à l'aide du document de discussion, des partis politiques et des experts sur les questions en jeu. Ces consultations visaient à recueillir leurs préoccupations et leurs opinions concernant les communications d'Élections Canada et des entités politiques avec les électeurs, dans le cadre du processus électoral.

Les services d'une firme ont été retenus pour mener un sondage téléphonique auprès de 1 011 électeurs de la population générale, afin d'évaluer leurs opinions et leurs attitudes sur certaines questions liées aux communications avec les électeurs. Le sondage a été mené du 21 novembre au 2 décembre 2012. Le rapport complet se trouve sur le site Web d'Élections Canada, à www.elections.ca.

De même, Élections Canada a confié à l'Institut de recherche en politiques publiques (IRPP), un centre d'études et de recherches établi à Montréal, la tâche d'organiser et d'animer une table ronde d'une journée avec des experts et des intervenants de plusieurs disciplines. Cette table ronde visait à recueillir de l'information et des conseils pour le directeur général des élections sur les façons possibles d'améliorer le processus électoral canadien. Un lien vers le rapport de l'IRPP se trouve également sur le site Web d'Élections Canada, à www.elections.ca.

La réponse aux incidents survenus lors de la dernière élection générale doit concilier des valeurs et des intérêts divergents. Les nouvelles technologies présentent pour les partis politiques et les candidats un immense potentiel de collecte de données permettant de cibler et de joindre les électeurs. Plus important encore, pour les électeurs, les communications avec les candidats et les partis sont au cœur de leur participation effective au processus électoral, l'essence même du droit de vote. Tant les électeurs sondés que les participants à la table ronde ont, dans l'ensemble, convenu que la capacité de bien communiquer avec les électeurs était cruciale. Parallèlement, toutefois, les Canadiens et les experts s'entendent pour dire qu'il faut absolument protéger les renseignements personnels des électeurs et préserver la confiance en l'intégrité du processus électoral.

Sur ce plan, notre régime doit être amélioré. Certes, les partis politiques et les candidats doivent continuer de pouvoir communiquer efficacement avec les électeurs, mais des mesures doivent être prises pour assurer une protection minimale des renseignements personnels et prévenir les communications trompeuses.

De même, les difficultés rencontrées au cours de l'enquête sur les appels trompeurs effectués pendant la 41e élection générale ont démontré que le commissaire doit être mieux outillé pour mener ses enquêtes. Dans le présent rapport, nous recommandons des outils qui existent déjà dans d'autres régimes fédéraux de nature régulatoire et qui sont déjà à la disposition de plusieurs autres organismes de gestion électorale.

Évidemment, les mesures législatives ne peuvent à elles seules prévenir une conduite inappropriée. Tous les participants au processus électoral se doivent d'agir de façon à respecter et à promouvoir les valeurs démocratiques et la primauté du droit.

Les méthodes de financement illégales, les dépassements des plafonds de dépenses et les communications trompeuses qui ont fait scandale, tant au niveau fédéral que provincial, soulèvent des questions troublantes pour les électeurs. Ce n'est pas uniquement une affaire de conformité à la loi : c'est aussi une question de valeurs et de fair-play. La ligne de démarcation entre un acte qui s'inscrit dans le cadre normal d'une concurrence électorale saine et dynamique et un acte qui mine la légitimité d'une élection risque de devenir de plus en plus floue.

Ainsi, chacun devrait se préoccuper du fait que, selon le sondage mentionné plus haut, les électeurs sont plus enclins à indiquer qu'ils font peu confiance (46 %), voire pas du tout (10 %), aux partis politiques fédéraux. C'est la raison pour laquelle le présent rapport ne porte pas strictement sur les exigences de la loi : on y recommande aussi d'envisager l'adoption de codes de conduite par les partis politiques, pour eux-mêmes et leurs partisans.

Mais des codes de conduite ne suffisent pas. La législation électorale doit être assez forte, non seulement dans ses sanctions, mais aussi par les outils qu'elle fournit pour détecter efficacement des actes répréhensibles. Autrement, il existe un danger réel que les participants décident qu'il est plus avantageux d'ignorer les règles que de les respecter, surtout s'ils pensent que leurs rivaux font de même. Bien que la confiance à l'égard du processus électoral demeure élevée (85 %, selon le sondage auprès des électeurs), il faut éviter de la tenir pour acquise. En fin de compte, c'est la capacité du processus électoral de jouer son rôle fondamental, soit légitimer le pouvoir politique, qui est en jeu.