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Déclarations et discours

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Allocution du directeur général des élections par intérim
devant le
Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
au sujet de la


création d'un commissaire indépendant
chargé des débats des chefs

Le 30 novembre 2017

Le discours prononcé fait foi

Je vous remercie, Monsieur le Président.

Il me fait plaisir d'appuyer le Comité dans son étude sur la création d'une commission indépendante chargée des débats des chefs.

J'ai suivi les travaux du Comité, et je suis heureux de vous présenter le point de vue d'Élections Canada.

Je parlerai brièvement des objectifs qui devraient, selon moi, guider la création d'une commission indépendante, ou d'un poste de commissaire, pour régir les débats des chefs. J'aborderai également quelques points qui touchent à la structure et au fonctionnement possibles d'une telle entité.

Objectifs d'une commission indépendante

Il existe plusieurs modèles dans le monde pour les débats des chefs, y compris des modèles de réglementation par une commission publique indépendante. Mais avant de concevoir un modèle particulier, il est important de considérer les objectifs qui pourraient mener le Comité à recommander la création d'une commission.

Pour ma part, je vous proposerais les trois objectifs suivants, qui sont directement liés à l'équité et l'ouverture du processus électoral :

  1. Les débats devraient être organisés de manière équitable, non partisane et transparente.
  2.  Les débats devraient être largement accessibles au grand public. Par exemple, ils devraient être présentés dans un format auquel le plus grand nombre de personnes possibles a accès, y compris les personnes handicapées.
  3. Les débats devraient contribuer à informer les électeurs sur les différents choix politiques qui s'offrent à eux.

Éléments à considérer

À mon avis, il y a trois éléments à prendre en considération pour établir une commission indépendante ou un poste de commissaire, en vue d'atteindre ces objectifs.

1. Critères d'inclusion dans les débats

De toute évidence, la sélection des participants est une des questions les plus importantes et litigieuses associées aux débats des chefs. Cette question a d'ailleurs suscité de vives controverses au fil des ans. Une commission indépendante ne devrait pas être mêlée à des controverses portant sur l'inclusion, surtout en pleine campagne.

C'est pourquoi les critères d'inclusion dans les débats devraient être clairs et ne laisser aucune ou alors très peu de discrétion à la commission. Les critères peuvent inclure un éventail de facteurs afin d'assurer une certaine flexibilité, notamment pour permettre la participation de partis émergents. Mais les critères devraient être tels que leur application par la commission soit simple, voire mécanique.

Il ne faut pas oublier que les contestations visant les débats des chefs et fondées sur la Charte canadienne des droits et libertés ont échoué jusqu'ici, parce que c'étaient essentiellement des évènements privés, qui ne sont pas assujettis à la Charte. Or, ce ne serait sans doute plus le cas si l'État, ou une entité créée par l'État, avait un rôle à jouer dans l'organisation des débats.

Je suis conscient de la difficulté de décider qui pourra participer aux débats des chefs. C'est précisément pourquoi il est important que les parlementaires établissent les critères appropriés.

2. Format et contenu des débats

Même si j'estime que les critères d'inclusion devraient laisser peu ou pas de latitude à la commission, je ne vois pas pourquoi celle-ci ne pourrait pas en avoir beaucoup plus dans le choix du format et du contenu des débats, sous réserve des grands objectifs dont j'ai parlé au début de mon allocution.

Pour ce qui est du format, nous savons tous que le paysage médiatique est en constante évolution, particulièrement en ce qui a trait aux médias sociaux. La commission devrait avoir la latitude pour s'adapter et tirer avantage des nouvelles possibilités.

Le choix du format des débats devrait néanmoins respecter et promouvoir l'égalité du français et de l'anglais.

La diffusion devrait également assurer l'accessibilité des débats aux personnes handicapées, par exemple en offrant le sous-titrage, l'interprétation gestuelle, une conception Web accessible ou d'autres moyens facilitant l'accès des personnes ayant des handicaps particuliers.

Si une commission indépendante s'occupait du contenu et du format des débats, elle pourrait être tenue de recevoir les suggestions des participants et d'autres intervenants. Elle pourrait également avoir l'obligation de rendre des comptes au Parlement après l'élection afin d'assurer la transparence de ses décisions.

3. Structure d'une commission indépendante

Le Comité doit également se pencher sur la composition et la direction d'une commission. De toute évidence, le président et les possibles membres de cette commission devraient posséder des connaissances et une expertise suffisante pour pouvoir organiser les débats. La commission pourrait inclure des représentants de réseaux traditionnels ainsi que de nouveaux médias, nommés selon un processus qui assurerait son caractère non partisan. Certains membres pourraient également provenir de groupes de la société civile.

Si l'on choisissait de créer uniquement un poste de commissaire, celui-ci pourrait consulter des groupes issus de la société civile et d'autres intervenants, ou encore former un comité consultatif pour l'appuyer dans ses décisions.

Certains ont suggéré qu'Élections Canada joue un rôle dans ce domaine. Je crois fermement qu'Élections Canada devrait rester en dehors de toute décision concernant les débats des chefs afin de rester au-dessus de la mêlée.

Les débats constituent un volet important de la campagne et influencent souvent les enjeux déterminants pour le vote. C'est ce qui rend les débats passionnants et importants. Le directeur général des élections ne doit pas être mêlé à des questions pouvant être perçues comme ayant une influence sur l'orientation de la campagne ou les résultats de l'élection.

Cela dit, vous voudrez peut-être envisager l'arbitre en matière de radiodiffusion pour la création d'un poste de commissaire ou d'une commission indépendante. Comme vous le savez, l'arbitre est une entité indépendante créée en vertu de la Loi électorale du Canada. Il est nommé sur décision unanime des partis à la Chambre des communes ou, à défaut d'unanimité, par le directeur général des élections après consultation des partis.

Par exemple, l'arbitre en matière de radiodiffusion pourrait être nommé président de la commission, essentiellement afin de faciliter les rencontres de la commission et d'assurer son bon fonctionnement. Ou encore, le modèle de l'arbitre pourrait être reproduit pour créer la commission ou le poste de commissaire.

La nature du mandat de la commission ne requerra pas nécessairement la création d'une entité permanente, entre autres parce que la plupart des décisions liées au contenu seront sans doute prises peu avant ou pendant la campagne.

Quel que soit le modèle choisi, Élections Canada pourrait certainement offrir un soutien administratif à une commission indépendante, y compris pour le paiement des dépenses de la commission. C'est le modèle qui est actuellement utilisé pour l'arbitre en matière de radiodiffusion, ainsi que pour les commissions indépendantes de délimitation des circonscriptions électorales.

Conclusion

Monsieur le Président, j'ai présenté un certain nombre d'éléments à prendre en considération qui, je l'espère, seront utiles au Comité pour délibérer et formuler ses recommandations sur ce sujet important.

Je répondrai maintenant avec plaisir à toutes questions que pourraient avoir les membres du Comité.