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IntroductionDocument de discussion 2 : L'incidence des plateformes de médias sociaux lors des élections

Les plateformes de médias sociaux – ces sites et applications Web qui permettent aux utilisateurs de créer, de partager et de découvrir du contenu et d'y réagir, et qui facilitent l'établissement de réseaux sociaux1 – sont devenues des sources d'information et d'interaction importantes pour les Canadiens. De la même façon, les plateformes numériques qui diffusent de la publicité basée sur les données, y compris les sites de médias sociaux et les moteurs de recherche, dominent maintenant le marché canadien de la publicité.

Les plateformes de médias numériques et sociaux sont également devenues un élément central de notre environnement électoral. Elles sont considérées comme de précieux outils pour communiquer efficacement et à peu de frais avec les Canadiens. On estime qu'elles incitent les citoyens à participer aux élections de nombreuses façons, que ce soit en mettant à jour leur inscription, en faisant un don à un parti ou à une cause politiques, en se renseignant sur les divers programmes politiques ou en s'informant pour savoir où, quand et comment voter.

Cependant, l'ingérence numérique dans les processus électoraux partout dans le monde a amené les gouvernements, les organismes de sécurité et d'autres acteurs à examiner de plus près les plateformes et ce qu'elles permettent aux utilisateurs de faire2. Comme de nombreux pays, le Canada a constaté que les menaces d'ingérence numérique font désormais partie du contexte électoral, et a pris des mesures pour renforcer la sécurité ainsi que détecter et atténuer une éventuelle ingérence numérique dans le processus électoral3.

Cet environnement numérique en pleine évolution soulève des questions sur la nécessité d'une plus grande réglementation. Ces questions vont au-delà du mandat d'Élections Canada, mais elles ont une incidence sur l'écosystème électoral dans lequel l'organisme exerce ses activités et pourraient avoir une influence considérable sur la confiance des Canadiens dans notre système démocratique.

Les plateformes de médias numériques et sociaux, piliers de l'économie numérique transcendant les frontières, se sont développées sans grande transparence ou contrôle externe4. Le débat s'intensifie pour déterminer la nécessité et la façon de réglementer le secteur de l'information numérique et les plateformes qui en font partie.5 Des points de vue divergents sur la façon de mettre en œuvre une telle réglementation et des préoccupations légitimes quant à la réglementation de l'expression politique ont alimenté ce débat6. Les plateformes elles-mêmes ont reconnu les préjudices potentiels et ont pris des mesures pour les atténuer.7

Le présent document vise à enrichir ce débat en mettant l'accent sur la façon dont les plateformes et leur utilisation influencent le processus électoral. Il précise les caractéristiques uniques que présentaient les médias sociaux et les plateformes publicitaires numériques basées sur les données lors de l'élection générale de 20198. Il traite de l'incidence de ces plateformes sur le contexte électoral dans lequel Élections Canada évolue, notamment en ce qui touche l'accès à de l'information fiable, la transparence et la confiance dans le processus électoral, et veut susciter une réflexion sur la meilleure façon de s'adapter à cette nouvelle réalité.

Notes de bas de page

Note 1 Adaptation de Jonathan A. Obar et Steven S. Wildman, « Social Media Definition and the Governance Challenge: An Introduction to the Special Issue », Telecommunications Policy, vol. 39, no 9, 2015, p. 745-750; Quello Center Working Paper 2663153 (en anglais seulement).

Note 2 Le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) a défini les menaces qui pèsent sur le processus électoral du Canada. Dans ses rapports publiés en 2017 et 2019, le CST a signalé que l'ingérence étrangère en ligne dans les démocraties dotées d'une économie avancée a plus que triplé depuis 2015, et que partout dans le monde, des acteurs nationaux et étrangers adoptent des techniques comme la désinformation et l'amplification artificielle. Ces techniques visent à réduire le taux de participation électorale, à influencer les résultats d'une élection et à semer la méfiance et la discorde. Centre de la sécurité des télécommunications, Cybermenaces contre le processus démocratique du Canada, 2017, https://cyber.gc.ca/sites/default/files/publications/cse-cyber-threat-assessment-f.pdf; Centre de la sécurité des télécommunications, Le point sur les cybermenaces contre le processus démocratique du Canada en 2019, 2019, https://cyber.gc.ca/sites/default/files/publications/tdp-2019-report-f_0.pdf.

Note 3 Élections Canada, « Sécurité des élections », 7 février 2020, https://www.elections.ca/content.aspx?section=vot&dir=bkg/sec&document=index&lang=f; Gouvernement du Canada, Institutions démocratiques, « Le gouvernement du Canada dévoile son plan pour protéger l'élection canadienne de 2019 », 30 janvier 2019, https://www.canada.ca/fr/institutions-democratiques/nouvelles/2019/01/le-gouvernement-du-canada-devoile-son-plan-pour-proteger-les-elections-canadiennes.html; voir en outre, Bureau du directeur général des élections du Canada, Rapport sur la 43e élection générale du 21 octobre 2019, p. 59-62, https://www.elections.ca/res/rep/off/sta_ge43/stat_ge43_f.pdf. Pendant la période électorale, le gouvernement fédéral a effectivement observé des tentatives d'opérations d'influence et d'information, bien qu'aucune n'ait atteint le seuil de communication publique fixé par le Protocole public en cas d'incident électoral majeur (Elizabeth Thompson, « "More needs to be done", Gould says after some online election meddling detected », CBC News, 28 octobre 2019, https://www.cbc.ca/news/politics/election-misinformation-disinformation-interference-1.5336662 [en anglais seulement]).

Note 4 Taylor Owen, « Introduction : Why Platform Governance? » dans Models for Platform Governance: A CIGI Essay Series, 2019, p. 3-6, https://www.cigionline.org/articles/introduction-why-platform-governance (en anglais seulement).

Note 5 Au Canada, cette question a été étudiée à l'échelle fédérale, notamment par les comités parlementaires tels que le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique (ETHI) et le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre (PROC), ainsi que lors de l'élaboration de politiques par (l'ancien) ministère des Institutions démocratiques et Patrimoine canadien. Cette question a fait aussi l'objet d'études et d'enquêtes par les commissaires fédéral et provinciaux à la protection de la vie privée. Aux États-Unis, des études ont été menées, entre autres, par le comité sénatorial sur le renseignement; des enquêtes du FBI ont donné lieu au rapport Mueller et à de multiples enquêtes, rapports et études. Au Royaume-Uni, le comité parlementaire sur le numérique, la culture, les médias et le sport a publié un livre blanc sur la réglementation des préjudices en ligne; le commissaire à l'information et le commissaire aux élections du Royaume-Uni ont chacun publié des rapports et des enquêtes sur le sujet, à l'instar de nombreux organismes de la société civile et agences de marketing britanniques. Des efforts conjugués sont également déployés à l'échelle internationale : on a, par exemple, mis sur pied le Grand Comité international sur les mégadonnées, la protection des renseignements personnels et la démocratie, auquel siègent les parlements de 17 pays, dont celui du Canada. Un sondage récent a révélé que 60% des canadiens croient que le gouvernement devrait intervenir pour « exiger que les médias sociaux règlent les problèmes qu'ils ont créés dans notre système politique. » (Abacus Data (août 2019), cité dans Tony Wang, « Majority of Canadians want government to regulate social media, poll says », The Toronto Star, 25 septembre 2019. https://www.thestar.com/news/canada/2019/09/25/majority-of-canadians-want-government-to-regulate-social-media-poll-says.html.

Note 6 Par exemple, Facebook a soulevé la nécessité « d'adopter de nouveaux cadres réglementaires pour le contenu en ligne – des cadres qui garantissent que les décisions des entreprises sur les communications en ligne limitent les préjudices, tout en respectant le droit fondamental à la liberté d'expression » (Monika Bickert, « Charting a Way Forward: Online Content Regulation », Facebook, février 2020, p. 4. https://about.fb.com/wp-content/uploads/2020/02/Charting-A-Way-Forward_Online-Content-Regulation-White-Paper-1.pdf).

Note 7 Kristie Phillips et Brian Fung, « Facebook Admits Social Media Sometimes Harms Democracy », The Washington Post, 22 janvier 2018. https://www.washingtonpost.com/news/the-switch/wp/2018/01/22/facebook-admits-it-sometimes-harms-democracy/. Adam Mosseri, « Working to Stop Misinformation and False News », Facebook, 7 avril 2017. https://www.facebook.com/facebookmedia/blog/working-to-stop-misinformation-and-false-news

Note 8 Dans ce document, nous nous penchons sur les activités des plateformes les plus utilisées pendant la 43e élection générale, soit du début de la période préélectorale, le 30 juin 2019, au jour de l'élection, le 21 octobre 2019. Pendant cette élection générale, l'Unité de surveillance des médias sociaux d'EC « fournissait en temps opportun des conseils et des renseignements utiles pour soutenir la bonne conduite de l'élection et une communication efficace, et préserver la confiance des Canadiens dans le processus électoral. » L'équipe, qui maîtrisait 21 langues, « surveillait des mots clés figurant dans les communications publiques de divers réseaux de médias sociaux afin de relever : les événements pouvant nuire aux électeurs ou à la conduite de l'élection; les commentaires sur les services d'Élections Canada; les sites Web et comptes de médias sociaux prétendant faussement représenter Élections Canada; les renseignements inexacts sur le processus électoral, qu'ils aient été diffusés intentionnellement ou non »; voir en outre, Bureau du directeur général des élections du Canada, Rapport sur la 43e élection générale du 21 octobre 2019, p. 59-62, https://www.elections.ca/res/rep/off/sta_ge43/stat_ge43_f.pdf.