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Participation électorale de divers groupes de jeunes Canadiens à l'élection fédérale de 2015

2. Profils sociodémographiques des différents groupes de jeunes

Afin d'explorer les raisons expliquant les écarts de la participation électorale, le rapport compare tout d'abord les caractéristiques sociodémographiques de différents sous-groupes de jeunes. On sait que certaines variables sociodémographiques, comme le sexe, le niveau de scolarité, le revenu, la profession, le statut de minorité visible et le statut d'immigration, ont une incidence importante sur le comportement électoral (Verba et coll. 1995, Gallego 2007, Blais et Loewen 2011). Le tableau 2 présente les liens bidimensionnels entre les caractéristiques sociodémographiques et les sous-groupes de jeunes. On compare les caractéristiques sociodémographiques des différents sous-groupes de jeunes, soit le cadre de vie, le statut d'Autochtone, le statut de minorité visible, le statut de personne handicapée et le statut professionnel.

Statut d'Autochtone

Globalement, les jeunes Autochtones sont légèrement plus jeunes et ont une mobilité résidentielle plus élevée comparativement aux jeunes non-Autochtones. Fait encore plus marquant, les jeunes Autochtones ont des niveaux beaucoup moins élevés de ressources socioéconomiques que les jeunes non-Autochtones, lesquelles sont mesurées selon le revenu, le niveau de scolarité et la profession. L'écart de revenu est relativement marqué : 71,1 % des jeunes Autochtones âgés de 18 à 34 ans signalent un revenu du ménage inférieur à 40 000 $, comparativement à 44,4 % des jeunes Canadiens non autochtones. Les jeunes Autochtones présentent également un niveau de scolarité moins élevé : 33 % d'entre eux ont un diplôme d'études secondaires ou moins, comparativement à 22,8 % des jeunes non-Autochtones. Enfin, les jeunes Autochtones sont plus susceptibles d'être aux études et d'avoir déménagé au cours de la dernière année et moins susceptibles d'avoir un emploi comparativement aux jeunes non-Autochtones, ce qui peut expliquer en partie cet écart de revenu.

Statut de minorité visible

Après examen du profil des jeunes appartenant à une minorité visible, nous pouvons constater que ce groupe présente un profil sociodémographique distinct. Ces jeunes signalent le niveau de scolarité le plus élevé chez tous les sous-groupes de jeunes, et ils sont beaucoup moins susceptibles d'avoir un diplôme d'études secondaires ou moins (18,6 %) que les jeunes n'appartenant pas à une minorité visible (23,2 %). Cependant, ils signalent des niveaux inférieurs de revenu du ménage et sont moins susceptibles d'avoir un emploi comparativement aux jeunes n'appartenant pas à une minorité visible, ce qui peut être expliqué partiellement par la discrimination dans le marché du travail. Les jeunes de minorités visibles sont, règle générale, plus jeunes et moins susceptibles d'être mariés et d'avoir des enfants, mais ils sont beaucoup plus susceptibles d'être nés à l'extérieur du Canada, comparativement aux jeunes n'appartenant pas à une minorité visible.

Statut professionnel

Comme il a été mentionné précédemment, il y a des écarts importants entre la participation électorale des jeunes sans emploi, des étudiants et des jeunes ayant un emploi. Le taux de participation inférieur des jeunes sans emploi pourrait avoir partiellement trait au fait que leurs niveaux de scolarité et leurs revenus de ménage sont inférieurs. Parmi les jeunes sans emploi, 41,2 % ont signalé avoir un diplôme d'études secondaires ou moins, et 61 % d'entre eux ont un revenu du ménage inférieur à 40 000 $. Les jeunes sans emploi sont également légèrement plus jeunes, moins susceptibles d'être nés au Canada et moins susceptibles d'être mariés, comparativement aux jeunes ayant un emploi.

Il n'y a pas d'écart important entre la participation des étudiants et celle des Canadiens ayant un emploi âgés de 18 à 34 ans, mais les étudiants présentent un profil sociodémographique différent de celui des jeunes ayant un emploi. En effet, ils signalent des niveaux de scolarité plus élevés, et une plus grande proportion d'entre eux ont effectué des études universitaires (53,1 %), comparativement aux jeunes ayant un emploi (45 %). Cependant, ils déclarent des niveaux de revenu du ménage inférieurs (en grande partie en raison du fait qu'ils sont aux études et qu'ils ne vivent plus avec leurs parents) à ceux des jeunes ayant un emploi. Enfin, ils sont plus jeunes, moins susceptibles d'être nés au Canada, d'être mariés et d'avoir des enfants et ont une plus grande mobilité résidentielle que les jeunes ayant un emploi.

Cadre de vie

Le tableau 2 compare les profils sociodémographiques des jeunes vivant en milieu rural ou dans de petites collectivités (c.-à-d. avec une population inférieure à 10 000 personnes) et ceux des jeunes vivant en milieu urbain. Les jeunes en milieu rural sont, règle générale, plus jeunes, plus susceptibles d'avoir des enfants et plus susceptibles d'être nés au Canada que les jeunes en milieu urbain. Fait encore plus marquant, les jeunes en milieu rural présentent, dans l'ensemble, des niveaux de scolarité très inférieurs (seulement 37 % d'entre eux ont fait des études universitaires) et des niveaux de revenu inférieurs (49,4 % d'entre eux ont un revenu du ménage inférieur à 40 000 $), comparativement aux jeunes vivant en milieu urbain.

Tableau 2 : Caractéristiques sociodémographiques de différents sous-groupes de jeunes
Statut d'Autochtone Statut de minorité visible Statut professionnel Cadre de vie Statut de personne handicapée
Autochtone Non-Autochtone • Appartenant à une minorité visible N'appartenant pas à une minorité visible • Sans emploi Étudiant Ayant un emploi • Milieu rural Milieu urbain • Jeune handicapé Sans handicap •
Revenu du ménage
(inférieur à 40 000 $ en %)
71,1*** 44,4 51,8** 43,9 61,0*** 77,9*** 36,3 49,4* 43,7 74,4*** 44,4
Marié (en %) 26,9 35,6 23,1*** 38,1 19,8*** 12,5*** 42,2 38,0 34,5 20,0** 35,9
Ayant des enfants (en %) 25,7 22,0 15,6*** 23,2 17,6 5,5*** 27,1 28,4*** 20,5 11,4** 22,6
Mobilité résidentielle (déménagement au cours de la dernière année en %) 57,0** 42,2 38,7 43,4 43,9 51,4*** 40,5 42,6 42,6 43,7 42,9
Né à l'étranger (en %) 5,5* 12,4 36,8*** 6,5 18,6* 15,2** 10,8 5,9*** 13,7 6,6 12,4
Sexe : masculin (en %) 42,3 51,0 44,3** 52,0 55,8 49,3 50,7 42,4*** 53,2 45,3 50,8
Âge (moyenne) 25,1* 26,1 25,0*** 26,3 26,0* 22,3*** 27,08 25,4*** 26,3 24,9 26,1
Niveau de scolarité (diplôme le plus élevé en %)
Études secondaires ou moins 33,0* 22,8 18,6* 23,2 41,2*** 24,6 22,1 26,8* 40,8 21,2 23,4
Études postsecondaires 23,9 30,7 23,8 31,3 28,7 22,2*** 32,8 36,2** 28,7 33,6 30,2
Études universitaires 43,1 46,5 55,9 44,6 26,7*** 53,1** 45,0 37,0*** 49,4 45,1 46,4
Statut professionnel
Sans emploi (en %) 3,6 3,4 2,9 3,4 - - - 2,3 3,7 9,5*** 3,2
Étudiants (en %) 38,2*** 20,5 33,3*** 18,8 - - - 22,3 20,9 37,1*** 20,6
Ayant un emploi (en %) 58,2*** 76,1 64,1*** 77,8 - - - 75,3 75,4 53,3*** 76,2
n minimum 97 2 141 357 1 837 64 452 1 817 492 1 715 90 2 145

Remarque : Jeunes Canadiens âgés de 18 à 34 ans.

Différences importantes sur le plan statistique : *** p<0,001; ** p<0,01; * p<0,05 (catégorie de référence :  •).

Statut de personne handicapée

Enfin, le tableau 2 compare les caractéristiques sociodémographiques entre les jeunes ayant un ou des handicaps et ceux n'ayant pas de handicap. Les jeunes handicapés sont généralement moins susceptibles d'être mariés et d'avoir des enfants, et ils sont relativement plus nombreux dans la catégorie des étudiants et des jeunes sans emploi, comparativement aux jeunes âgés de 18 à 34 ans sans handicap. Il n'y a pas d'écart entre le niveau de scolarité des deux groupes, mais les jeunes handicapés sont beaucoup plus susceptibles de signaler un niveau de revenu inférieur (74,4 % d'entre eux ont un revenu du ménage inférieur à 40 000 $).

Nous constatons que les différents groupes de jeunes présentent des profils sociodémographiques assez distincts ainsi que des cadres de vie différents. Cependant, nous avons aussi constaté que les jeunes Autochtones, les jeunes appartenant à une minorité visible, les jeunes en milieu rural, les jeunes sans emploi, les étudiants et les jeunes handicapés présentent tous des niveaux de revenu inférieurs en comparaison. De plus, règle générale, ces groupes affichent un désavantage comparatif, par rapport au niveau de scolarité ou à l'emploi (ou les deux). Les niveaux de ressources socioéconomiques généralement inférieurs présentés par ces groupes de jeunes expliqueraient pourquoi ils sont moins susceptibles de voter aux élections (Verba et coll. 1995). Les étudiants ont tendance à faire figure d'exception à cet égard. Des études antérieures laissent entendre que les étudiants ont un taux de participation relativement élevé comparativement aux autres jeunes (Gélineau 2013). Certaines variables sociodémographiques peuvent avoir une signification différente pour les étudiants. Par exemple, les étudiants n'ont pas encore terminé leurs études; par conséquent, leurs niveaux de scolarité ne reflètent pas les niveaux de scolarité qu'ils atteindront ultimement. Par ailleurs, la mobilité résidentielle peut ne pas revêtir la même signification pour les étudiants. Si ces derniers ne vivent pas avec leurs parents, il est très probable qu'ils vivent dans leur appartement depuis peu. En outre, le revenu familial a tendance à avoir une signification différente pour les étudiants, selon qu'ils vivent avec leurs parents ou non (Niemi et Hanmer 2010). Nous déterminons la signification des caractéristiques sociodémographiques pour la participation au scrutin des différents sous-groupes de jeunes dans la dernière section, dans le modèle multivarié.