open Menu secondaire

Pratiques de consultation et d'évaluation dans la mise en œuvre du vote par Internet au Canada et en Europe

Recommandations relatives à la mise en œuvre des pratiques exemplaires de consultation et d'évaluation

Les cas examinés dans le présent rapport et d'autres renseignements découlant des recherches préparatoires pour notre étude nous ont amenés à formuler un certain nombre de recommandations sur les meilleures modalités de consultation et d'évaluation si on envisage ou met en œuvre des essais de vote par Internet. Ces recommandations sont présentées en fonction des objectifs stratégiques d'Élections Canada axés sur la confiance, l'accessibilité et l'engagement. Certaines d'entre elles s'appliquent également aux instances désireuses de mener des consultations pour améliorer leurs méthodes relatives au vote par Internet ou de parfaire les procédures actuelles d'évaluation associées au cybervote.

On note des points communs dans les pratiques de consultation et d'évaluation de plusieurs des cas étudiés. Toutefois, comme ces approches ont également des éléments distincts en ce qui a trait aux analyses et aux évaluations, il serait approprié de considérer l'adoption de stratégies individuelles concernant le développement du vote par Internet dans les années à venir. Il ne faut pas oublier, en prenant note des recommandations, que chaque compétence, tant au Canada qu'à l'étranger, a des facteurs contextuels qui lui sont propres. Des consultations publiques rigoureuses peuvent avoir leur importance par rapport à certains aspects, mais elles peuvent également être redondantes ou inutiles à d'autres moments. Si l'on intègre des stratégies visant à faire participer la population, il est préférable d'opter pour une approche personnalisée quant au type, à la conception et à la portée des méthodes de consultation afin d'atteindre une efficacité optimale. Même si nous ne sommes pas en mesure de formuler des recommandations détaillées ou de donner des précisions sur une recette de mise en œuvre du vote par Internet ou sur l'élaboration d'une politique concernant les pratiques de consultation et d'évaluation, nous pouvons tout de même présenter quelques recommandations générales qui pourront être utiles aux gouvernements, aux organismes électoraux et aux décideurs qui, soit se penchent pour la première fois sur l'éventualité du vote par Internet, soit désirent perfectionner les modèles existants.

Consultation

Tout d'abord, nous recommandons l'adoption d'une politique d'ouverture et de transparence dans l'élaboration de projets de vote par Internet. La confiance et la transparence sont des notions étroitement liées. Plus un processus est ouvert et imminent, plus il est probable que la population et les autres intervenants auront foi dans le processus décisionnel et les résultats. La confiance est essentielle pour que l'on puisse se fier au processus électoral, et ce niveau de confiance doit être maintenu dans le but de préserver la légitimité et l'intégrité du système. Il faut également qu'il y ait une confiance, sur les plans social et politique, afin de favoriser le capital social, qui contribue à l'engagement des citoyens, un engagement qui se trouve au cœur même de la participation aux élections.

Des communications périodiques avec la population et l'information fournie aux électeurs au fur et à mesure qu'avancent les projets permettront de renforcer la confiance de ces derniers à l'égard du gouvernement et des changements apportés aux institutions et aux processus électoraux. Au Canada, par exemple, dans le cas de la Ville de Truro, les administrateurs des élections ont déployé de vastes efforts de communication et d'information et ont réussi à gagner la confiance des citoyens quant au système de vote électronique. Ils ont notamment envoyé des dépliants à toutes les adresses résidentielles, publié une rubrique périodique dans le journal local pendant six mois avant les élections, organisé un kiosque au marché agricole local, mobilisé les médias locaux et renseigné sur le processus les bibliothécaires de la ville et le personnel des établissements de soins infirmiers afin que ces personnes puissent aider les électeurs et agir à titre d'ambassadeurs. L'approche a été couronnée de succès : le taux de participation électorale a augmenté de 140 % et le vote en personne aux bureaux de scrutin a été éliminé. En Norvège également, la transparence du plan de communication a aidé à renforcer la confiance envers le scrutin électronique. Les municipalités ont été ouvertement invitées à prendre part au processus, des visites d'information ont été organisées par le ministère responsable de la tenue du vote, de la publicité locale a été diffusée et un essai ouvert du système a été mené avant le jour du vote. Ces exemples sont uniques aux villes en question, mais ils démontrent tous une ouverture à recevoir les commentaires du public.

Deuxièmement, nous recommandons d'adopter des stratégies favorisant la participation de la population, même si la portée et la forme de la participation seront déterminées par le contexte particulier. En règle générale, il faut prévoir de meilleures tribunes, et en plus grand nombre, pour obtenir la participation du public. Puisque le vote par Internet est vu comme une initiative de service axé sur le citoyen et que son succès est jugé en grande partie par la mesure dans laquelle il est accepté et utilisé par la population, il est important que les résidants soient consultés avant son adoption. À de rares exceptions près, les mécanismes de consultation actuels visent surtout les élites (c.-à-d. porte-parole gouvernementaux, responsables de l'élaboration des politiques, techniciens experts et groupes d'intérêt particuliers) et ne tiennent pas compte du grand public. Pour que les consultations soient élargies et qu'elles incluent les électeurs, les instances doivent envisager le recours aux technologies numériques et mobiles, particulièrement les applications des médias sociaux ou autres types de portail en direct permettant une communication virtuelle et interactive. Si nous progressons vers un monde plus numérique et un modèle de service axé sur Internet, il ne serait que logique de faciliter les consultations publiques au moyen de ces mêmes tribunes, en plus des démarches plus classiques, par exemple les réunions ou groupes de discussion.

L'exemple de Truro, mentionné précédemment, illustre bien l'utilisation de stratégies d'information et de sensibilisation visant à favoriser la participation du public, mais il faut signaler que la municipalité compte un électorat de taille relativement modeste (environ 10 000 personnes). Dans les plus grandes collectivités, il faudrait envisager d'autres tactiques pour faire participer la population. Le cas d'Edmonton, qui a eu recours à des sondages d'opinion publique, à des tables rondes de citoyens, à une élection fictive et à un Jury des citoyens sur le vote Internet, est un bon exemple d'utilisation d'options supplémentaires.

En troisième lieu, il faut envisager l'élaboration de programmes de rayonnement qui combinent l'information sur le vote par Internet et des renseignements plus généraux, en insistant sur l'importance de la participation électorale pour une démocratie plus saine. Ces initiatives s'inscriraient bien dans des programmes d'études scolaires sur l'éducation civique, et serviraient un autre objectif stratégique, à savoir l'augmentation de la participation des jeunes au processus électoral. Malheureusement, nous n'avons pas trouvé d'exemple de programme de ce genre dans nos études de cas, mais les campagnes d'information des villes de Markham et de Truro comportaient certains éléments faisant appel à la participation des citoyens. Tandis que Markham se concentrait sur les technologies numériques pour toucher et mobiliser les électeurs, Truro a eu recours à la fois à des stratégies classiques en allant vers les gens et en discutant avec eux et à des outils modernes tels les médias sociaux. En Europe, la tradition voulant que les organismes électoraux encouragent la participation aux élections est moins bien établie; cet aspect incombe généralement aux partis politiques.

S'ajoutant à la priorité de mobiliser le grand public, notre quatrième recommandation est de faire participer et de consulter les autres intervenants des élections, notamment les candidats, les médias et, s'il y a lieu, les organismes de défense. On pourrait ainsi organiser des séances de formation à l'intention des candidats (ou des partis politiques, le cas échéant), des rencontres avec les médias et des discussions avec d'autres groupes. Le vote par Internet est une solution qui touche particulièrement les candidats. Dans les collectivités où ces derniers ont été consultés, la majorité d'entre eux adhéraient au vote par Internet comme autre méthode de vote et en faisaient même la promotion dans leurs documents de campagne. Depuis l'introduction de l'option de vote par Internet en 2005, l'Estonie, par l'entremise de l'Académie de la cybergouvernance de Tallinn, a offert aux partis politiques des séances de formation. À Halifax, à titre de comparaison, les candidats étaient plus réceptifs à la technologie après avoir assisté aux séances d'information sur le sujet. Puisque le vote par Internet modifie la nature des campagnes lorsqu'il est offert pendant la période du vote par anticipation, les candidats peuvent être intégrés dans le processus ou à tout le moins renseignés à son sujet si l'on met l'accent sur le début plutôt que sur la fin de la campagne (Goodman, sous presse). Les candidats et les médias sont des sources particulièrement importantes de renseignements pour les électeurs; il est donc important que ces renseignements soient exacts.

Cinquièmement, le moment est important. Nous recommandons la tenue de discussions à des niveaux multiples aux premiers stades du processus. Les administrateurs du gouvernement doivent organiser des tribunes de discussion à l'intention des élus, des partis politiques (s'il y a lieu) et d'autres groupes. Lorsque l'appui politique est acquis et que l'on mène des recherches supplémentaires, il faut prévoir du temps pour effectuer un sondage auprès de tous les intervenants et les consulter ouvertement. Il est important de tenir des consultations avant qu'un plan ne soit en place; la rétroaction des intervenants pourra alors être intégrée dans l'élaboration du programme et servir pour établir la confiance et obtenir le soutien de la population.

Sixièmement, il faut recueillir systématiquement des données à l'aide de méthodes quantitatives et qualitatives qui pourront servir dans le cadre des projets à venir. Plus précisément, de tels renseignements permettront aux instances de décider s'il y a lieu d'étudier des méthodes de vote électronique et par Internet. Si elles se prononcent contre une telle initiative, ces renseignements pourront les aider à justifier leur refus d'aller de l'avant. Si une région décide de poursuivre son examen du vote par Internet, les données obtenues à des fins de consultation aideront les administrateurs et les élus à sélectionner les options numériques pouvant être appropriées à la région en question. L'information recueillie grâce aux pratiques de consultation peut également être comparée aux renseignements réunis dans le cadre des procédures d'évaluation, offrant de multiples données qui assisteront les administrateurs dans l'évaluation des répercussions sur le processus électoral.

Dans les trois pays d'Europe dont il est question dans le présent rapport, à savoir l'Estonie, la Norvège et la Suisse, on a mené des recherches-sondages, mais ces dernières ont eu lieu à l'étape de l'évaluation, après la tenue des essais. Dans les études fédérales canadiennes sur les élections et autres enquêtes par sondage, on pose parfois des questions sur l'éventualité du vote par Internet, mais peu de données d'enquête ont été recueillies concernant les cas où ce mode de scrutin a été utilisé. Edmonton fait exception, car elle a obtenu des données d'enquête grâce à son initiative de consultation publique. De plus, comme il est mentionné précédemment, la Ville de Guelph a commandé un sondage afin d'en savoir davantage au sujet des expériences des électeurs, de l'effet éventuel du vote par Internet et par téléphone, et de l'intérêt envers les méthodes de vote électronique, car ce sont les représentants de la municipalité qui décideront s'il y a lieu d'introduire l'option de vote par Internet. La collecte de données supplémentaires auprès d'administrations municipales canadiennes dotées de caractéristiques (c.-à-d. région géographique, taille, électorat admissible) différentes serait un bon point de départ pour effectuer des évaluations et des analyses plus approfondies. Ces renseignements constitueraient un outil important pour les gouvernements qui doivent de plus en plus décider d'opter ou non pour le vote en direct.

En ce qui a trait aux méthodes de communication, nous recommandons que les responsables de la gestion des élections aient recours à des méthodes directes de communication appropriées aux circonstances. Mentionnons, à titre d'exemples, les visites par bateau dans les collectivités éloignées en Norvège et la dotation en personnel d'un kiosque au marché agricole de Truro. Les méthodes appropriées seront déterminées par les facteurs contextuels et les caractéristiques particulières de l'instance. Un bon point de départ serait de sélectionner les endroits où se réunissent de vastes segments de l'électorat. De plus, il serait probablement sage de combiner les méthodes classiques de communication et quelques stratégies nouvelles, notamment à l'aide des technologies numériques et mobiles, pour veiller à cibler le plus grand nombre possible d'électeurs.

Enfin, il peut être extrêmement avantageux de former des partenariats et d'établir des rapports avec d'autres instances, les universités, les instituts de recherche, les organismes de défense et les praticiens, en vue de recueillir des données, mener des recherches et créer des stratégies pour faire face aux problèmes éventuels. Le fait de tirer des leçons des stratégies de consultation des autres ou de travailler de concert avec des partenaires de façon à mieux élaborer des méthodes de consultation particulières et intéressantes peut rendre le processus plus rentable, plus efficace et plus complet. Au Canada, le partenariat d'Edmonton avec le Centre for Public Involvement de l'Université de l'Alberta en est un bel exemple. Rencontrer les représentants d'autres instances a été fructueux, notamment dans le cas de la Ville d'Edmonton qui s'est entretenue avec les représentants de Markham et d'Halifax, mais il faudrait favoriser davantage la collaboration et le partage de l'information entre instances et ordres de gouvernement afin d'être plus efficace en matière de collecte d'information, d'améliorer le rapport coût-efficacité et d'obtenir un meilleur aperçu de l'élaboration des systèmes. Ceci est vrai tant au Canada qu'à l'étranger. Des régions comme les Nouvelles-Gales-du-Sud, en Australie, par exemple, travaillent à l'élaboration d'un modèle de vote en direct, mais ont de la difficulté à mettre la main sur des travaux de recherche récents et fouillés.

Évaluation

La première recommandation, et la plus importante en ce qui a trait aux instances, est d'élaborer des cadres rigoureux d'évaluation. Il est donc nécessaire d'élaborer un plan détaillé de la conduite de l'évaluation et des critères sur lesquels elle reposera. Nombre de ces critères doivent se fonder sur les valeurs cruciales des activités électorales dans l'instance en question et les objectifs des administrateurs des élections. Pour plusieurs municipalités canadiennes, les modalités d'évaluation se composent de diverses activités spéciales et/ou de la compilation de documents écrits. Nous relevons certaines similitudes entre municipalités, mais chaque système d'évaluation actuellement utilisé semble être propre à la collectivité qui y a recours. Dans nombre d'instances, les processus d'évaluation doivent devenir plus systématiques et pourraient tirer avantage du partage des pratiques exemplaires et de l'adoption de cadres d'évaluation analogues entre villes ou grandes villes. Dans la plupart des cas, les protocoles actuels semblent bien fonctionner, de l'avis des responsables qui les utilisent. Plusieurs responsables sont en place depuis longtemps, connaissent bien la région et la culture et sont extrêmement perspicaces pour analyser les activités et apporter au besoin des améliorations. Toutefois, il faut des processus plus rigoureux pour évaluer le vote par Internet, car les préoccupations concernant la sécurité, la protection des renseignements personnels des électeurs, l'authentification et la fraude exposent ce mode de scrutin à un examen plus poussé du public.

En Europe, les instances qui tiennent des scrutins par Internet bénéficient des rapports d'évaluations menées officiellement par le BIDDH-OSCE, en plus des rapports officiels d'évaluation commandés par des instituts indépendants des pays concernés. Le rapport de l'Institut de recherche sociale, en Norvège (ISF, 2010) et celui du professeur Pascal Sciarini de l'Université de Genève en Suisse (Sciarini, 2011) en sont des exemples. Les critères retenus dans ces évaluations pourraient utilement être analysés par les autres instances qui comptent mener des essais de vote par Internet.

Les questions de contexte abordées au début du présent document (à la rubrique Contexte de consultation et d'évaluation) peuvent offrir un ensemble de base de critères d'évaluation. Les voici :

  • Le taux de participation électorale a-t-il augmenté?
  • L'accessibilité (pour les personnes handicapées, les aînés, les jeunes, les groupes minoritaires, etc.) s'est-elle améliorée?
  • Le vote à l'extérieur est-il devenu plus accessible?
  • A-t-on réglé les préoccupations en matière de sécurité?
  • Le secret du vote est-il garanti?
  • Les électeurs estiment-ils avoir plus de pouvoir?
  • Offre-t-on des services de cybergouvernement? (si c'est un objectif pertinent)
  • Stimule-t-on le développement technologique? (si c'est un objectif pertinent)

De plus, nous recommandons que soient appliquées, dans les critères d'évaluation, les normes reconnues internationalement en matière de légalité et d'équité. Ces critères permettront de veiller à que le processus soit accessible et équitable. Ils sont par ailleurs importants pour maintenir l'intégrité du processus électoral, notamment à la lumière de l'introduction de nouvelles technologies.

Les normes sur lesquelles repose l'évaluation du vote par Internet sont prises en compte, en plus des critères d'évaluation habituellement appliqués par une organisation internationale comme le BIDDH-OSCE à l'ensemble de l'élection, et qui comprennent la conformité avec le cadre juridique du pays, le respect du droit de vote, les droits des candidats de se présenter aux élections, l'application des lois concernant le financement des partis et de la campagne ainsi que le dépouillement honnête et transparent du scrutin. Certains critères fondamentaux, par exemple le fonctionnement du processus d'inscription des électeurs, offrent une possibilité particulière d'application à l'option de vote par Internet, si des numéros NIP ou des codes sont utilisés pour l'authentification des électeurs. Enfin, les questions de sécurité sont des critères beaucoup plus évidents dans le cas des initiatives de vote par Internet que pour le vote à un bureau de scrutin.

Notre seconde recommandation, qui s'harmonise avec des cadres d'évaluation plus systématiques, est d'avoir une tenue de dossiers plus complète. Au Canada, nombre de collectivités partagent leurs dossiers informatiques, recueillent des notes qui sont conservées dans un fichier, ou espèrent simplement que les responsables parviendront à se souvenir par eux-mêmes des détails de l'évaluation. En Europe, la situation varie. Le canton de Genève conserve des données statistiques poussées sur l'utilisation du vote par Internet dans la totalité des référendums et des élections, mais le canton de Neuchâtel ne fournit que peu de renseignements. L'Estonie possède des données statistiques globales sur l'utilisation du vote par Internet, mais sans ventilation supplémentaire. On ne sait pas très bien, par exemple, combien de personnes handicapées ont pu voter par Internet dans l'une ou l'autre des instances européennes ou canadiennes, malgré le fait que l'un des objectifs fréquemment évoqués est de faciliter l'accès au vote pour les personnes handicapées. Pour tirer des leçons des évaluations, être à même de communiquer des détails particuliers, établir des comparaisons avec d'autres instances ou comparer la situation d'une élection à l'autre, il est essentiel que la tenue de dossiers soit rigoureuse.

Troisièmement, de façon à faciliter une évaluation systématique, nous recommandons que soient précisés d'avance les objectifs des activités de vote par Internet, afin qu'on puisse établir des critères d'évaluation. Dans certains cas, nous avons constaté qu'il était difficile de procéder à une évaluation, puisque les résultats souhaités n'avaient pas été précisés au départ. Dans d'autres cas, les objectifs avaient peut-être été établis, mais sans critère concernant leur observation systématique. Parfois, on a évité les objectifs précis, en raison de doutes concernant la capacité du système d'atteindre ces objectifs, par exemple l'augmentation de la participation électorale. Pour les administrateurs des élections, il est important de pousser la réflexion jusqu'aux objectifs, non seulement pour garantir une évaluation systématique, mais aussi pour s'assurer que le type de vote électronique choisi (c.-à-d. Internet à distance, kiosque, vote par Internet et par téléphone) et la période au cours de laquelle il est offert (c.-à-d. vote par anticipation ou élection entière) servent ces objectifs. Dans la première recommandation, nous avons établi un ensemble de critères relatifs à l'évaluation, mais tous ne sont peut-être pas des objectifs particuliers que poursuit chacune des compétences. Il faut s'y attendre, mais l'essentiel est de tenir compte des objectifs dès le départ et de les préciser.

Quatrièmement, nous recommandons l'obtention systématique d'une rétroaction postélectorale. Même si la plupart des instances tiennent à recevoir de la rétroaction, elles font souvent fi des groupes clés. À titre d'exemple, dans certaines compétences, seuls sont interviewés ou sondés les employés des bureaux de scrutin où l'on vote sur bulletin imprimé et l'on néglige de recueillir des renseignements plus globaux auprès des citoyens ou d'autres intervenants. De plus, il serait utile de parvenir à une certaine normalisation en matière de rétroaction, ce qui permettrait d'établir des comparaisons au fil du temps et entre instances. Grâce aux informations et à la rétroaction supplémentaires obtenues, il serait possible d'améliorer la qualité de l'évaluation et l'élaboration du modèle. Tout comme dans les consultations préliminaires aux élections, nous recommandons le recours à des méthodes tant quantitatives que qualitatives. Dans un contexte idéal, les constatations devraient être communiquées aux autres instances, aux autres ordres de gouvernement, et peut-être à la population et à d'autres organismes ou groupes pertinents.

Cinquièmement, nous recommandons que soient retenus les services d'organismes indépendants chargés de fournir des évaluations et des vérifications indépendantes de la sécurité des activités de vote par Internet. Les évaluations indépendantes sont utiles pour assurer une évaluation impartiale, particulièrement en ce qui a trait aux aspects de sécurité. Elles servent également à renforcer la confiance dans la nouvelle méthode de vote. Le rapport d'évaluation de l'Institut de recherche sociale de la Norvège en est un exemple. Dans tous les cas canadiens étudiés, un vérificateur indépendant a évalué le système et communiqué ses observations. Dans certains cas, afin de réduire les coûts, il s'agissait d'une personne à l'interne. Dans un contexte idéal, on choisirait pour exécuter cette fonction une personne ou un groupe indépendant.

Enfin, tout comme dans le cas des consultations, l'une des recommandations clés est d'établir des partenariats pour l'étape de l'évaluation. Les instances devraient plus particulièrement envisager la mise en place d'un réseau de coopération avec les universités ou les instituts de recherche locaux afin qu'ils participent à l'évaluation des essais de vote par Internet; d'autres intervenants, par exemple l'industrie ou d'autres groupes, pourraient également être mobilisés. Mentionnons que le partenariat entre la Ville d'Edmonton et le Centre for Public Involvement a servi à tenir des consultations publiques de manière objective. L'évaluation menée par des chercheurs de l'Université de Tartu sur le système de vote par Internet de l'Estonie est un autre exemple. En ce qui a trait à la collaboration avec l'industrie, les sondages postélectoraux et les rapports que la Ville de Markham a obtenus sont inestimables, à la fois pour les évaluateurs et les chercheurs. Les partenariats de cette nature peuvent aider à alléger le fardeau de la recherche ou les autres coûts liés à l'évaluation et permettre de réunir plus facilement des experts en vue d'obtenir des conseils et de mener des analyses. Œuvrer de concert avec d'autres instances et d'autres acteurs pour simplifier et normaliser les procédures d'évaluation pourrait aussi présenter des avantages à long terme.